Re-Trait
du 6 mars au 13 avril 2007
à la Fondation d'Entreprise Ricard
Dessiner. C’est bien un verbe. On n’a pas de verbe pour le mot image. On confond bien trop souvent le dessin et l’image.
L’exposition Re-trait qui se tient actuellement à la Fondation d’Entreprise Ricard revient sur cette confusion en privilégiant le dessin à l’image. (il ne reste que quelques jours pour vous y rendre mais vous pouvez tout aussi bien faire un tour sur leur site pour consulter leur galerie de photos)
On juge bien trop souvent l’image dans le dessin, et par image, j’entends le résultat figé de l’action de dessiner. Une image est alors jolie ou moche, à souhait.
Le dessin est trop souvent oublié au profit de l’image alors qu’il est précisément ce qui fait que l’image est unique.
Dans l’exposition, le dessin n’est pas réalisé en vue d’une image mais il se décrit comme un chemin en revenant ainsi à son sens premier : dessin/dessein. On est donc dans un en-deçà, dans un avant l’image, dans un pendant, celui du dessin.
Le dessin est donc présenté comme une expérience, quelque chose à vivre dans une durée.
Si quelques œuvres, comme les dessins à la colle de Rainier Lericolais ou les phone drawings de Jonothan Borofsky, si ces œuvres-là appartiennent sans aucun doute au champ large du dessin contemporain, certaines se voient attribuer un sens supplémentaire en se frottant au champ du dessin.
C’est le cas de la performance de Tanaka how to draw a line on the road.
Des briques de lait dont disposées de manière linéaire et à intervalles réguliers sur une route. Une voiture passe et dessine une ligne blanche en écrasant une à une les briques de lait. La performance est restituée par deux vecteurs : la vidéo (on est alors bien face à un paysage, la ligne blanche fuyante sur la route intervient comme une oblique qui dynamise la composition de cadre) et la photo (les photos présentent la ligne blanche cadrée à l’horizontale, donc l’après-performance, nous est alors donné à voir un remake du zip barnettnewmanien version demi-écrémé). Les couleurs, les cadrages, tout relève ici d’un souci esthétique qui ne fait que mettre en valeur le geste, la performance, véritable évolution du dessin loin du crayon et de la feuille blanche.
Une autre œuvre qui si elle parle de dessin s’inscrit elle aussi dans la durée : en suivant la main droite de marylin monroe dans the misfits de Pierre Bismuth. Et pour cause, il passe par le cinéma, l’image-mouvement pour réaliser son image. Cette empreinte blanche sur noir, cette trace lumineuse, c’est l'enregistrement des mouvements de la main de Marylin Monroe dans the misfits.
Grouillement désordonné. Contraste noir/blanc. Ce sont bien les mouvements de Marylin qui sont à l’origine de ce gribouillis mais nulle trace du glamour de la Monroe.
L’image que produisent ces œuvres de Bismuth ressemble de beaucoup aux radiographies de pensée de la graphiste-typographe, Catherine Zasks. Avec ses gribouillis, elle crée un espace, une sorte de pelote qui ondulerait sur elle-même. Sont donc alors présents dans un même gribouillis, l’espace et le temps. Le dessin devient alors mouvant et totalement autonome. On n’est finalement pas très loin du stream of consciousness de W. James.
Zasks adopte la même présentation que Bismuth quant à ses radiographies de pensée : de grands caissons lumineux qui font ainsi apparaître la trace comme un négatif.
« Si le corps peut produire une trace, pourquoi pas la pensée ? » Zasks.
Tanaka et Bismuth, images provenant du site de la Fondation d'Entreprise Ricard, Zasks, image provenant du site pixelcreation